Mustapha Naïmi : «Le Maroc responsabilise directement l’Algérie sur la situation de blocage au Sahara»
Mustapha Naïmi affirme que le Maroc adopte une position de fermeté à
l’égard de l’Algérie, des Nations Unies et des pays susceptibles de
demander certaines concessions supplémentaires au Maroc.
ALM: SM le
Roi a affirmé dans son discours à la Nation que le Maroc ne renoncera
pas au moindre pouce de son Sahara. Quelle lecture en faites-vous?
Mustapha
Naïmi : C’est une position de principe qui indique la détermination de
l’Etat et sa position initiale. On n’a aucun mal à la comprendre
d’autant plus qu’elle constitue le socle de la position de l’Etat. C’est
cette position inhérente à toute évolution possible du dossier qui
seule peut conjuguer et articuler les contours de la fermeté de l’Etat,
fait de la maîtrise des données relatives à l’unité territoriale le
socle le plus fondamental de la construction du social, de l’économique
et du politique. Pour établir les bases qui conditionnent sa permanence
comme système étatique organisé, le discours royal imprime sa marque sur
les communautés en les soumettant à ses normes et à ses canons, en
socialisant en priorité les fonctions unionistes dont dépend sa
perpétuation et en contrôlant la force du consensus sur lequel repose la
reproduction des principes essentiels de l’Etat. Celui-ci doit, du
mieux possible, protéger chacune des régions contestées contre les
agressions externes et leur assurer les conditions de leur intégrité
physique. En même temps, à l’autre terme de la position, chaque région
concernée est soumise sans aucune médiation aux exigences et
sollicitations de son propre corps et, même si une réponse ne peut leur
être apportée que dans le cadre d’une relation avec la monarchie,
l’exercice des fonctions de l’État et de son activité politique
constitue le socle du système des échanges sur lequel repose tout lien
avec les institutions internationales.
Le Souverain a appelé
l’Algérie à cesser de contrarier la logique de l’histoire et à renoncer à
ses manœuvres désespérées visant à torpiller la dynamique enclenchée
par la proposition de l’autonomie. Qu’en pensez-vous?
Diplomatiquement
c’est là une position de fermeté à l’égard de l’Algérie, des Nations
Unies et des pays susceptibles de demander certaines concessions
supplémentaires au Maroc. Le Maroc nomme et responsabilise directement
un pays voisin sur la situation du blocage total dans lequel se trouve
le dossier du Sahara. Il y a là matière à édifier un champ de
convergences. Non pas en comparant un à un des faits que l’on
dénaturerait en les sortant de leur contexte, mais plutôt en recherchant
quelques similitudes ou rapprochements possibles du point de vue des
positions standards de l’État algérien. C’est là qu’un projet politique
de l’opposition stratégique peut prendre corps, fondé sur les
incompréhensions des situations génératrices des conflits, c’est-à-dire
tout le contraire d’un discours sur l’efficacité morale des systèmes de
solidarité interrégionale. Seule une vision totalement externe aux
intérêts stratégiques de l’État algérien est a priori en mesure
d’accélérer les phénomènes d’intégration régionale du Maroc et de
l’Algérie dans un processus de proximité et de compréhension politique.
Les déconnexions actuelles sont à la limite de la légalité, et éclairent
d’une manière particulière l’action de l’État en tant qu’institution
régulatrice du conflit régional avec un État tiers.
En réaction
au discours de SM le Roi, le front séparatiste a dit que ce discours
attise la guerre. Comment réagissez-vous à cela?
Le message de
fermeté a été compris comme une volonté d’avancement dans la position
unilatérale du Maroc face à la résistance algérienne et polisarienne. Il
reste aux Nations Unies de le comprendre et de faire en sorte que les
suites du processus de règlement prennent en conséquence cette
détermination. L’analyse de la position du front Polisario suppose donc
une position d’observateur qui permet de saisir les enjeux d’une
situation et aussi les restes. D’un point de vue stratégique,
l’observation rapprochée selon une volonté d’aggravation de la
déclaration royale se déploie comme une volonté de responsabilisation du
Maroc. Les enjeux se calquent des positions antérieures qui rappellent
la volonté conflictuelle, les repères et les indices implicites, les
fragments d’attention, les objets d’obsession et aussi ces détails dont
l’importance peut être mise entre parenthèses. De ce point de vue, il
ressort un enjeu important que l’on peut associer à l’objectif général
confronté au risque, si souvent critiqué et évité en milieux
internationaux, préférant d’emblée articuler le vécu conflictuel au
schéma relationnel : le suivi du dossier à travers les efforts déployés
par les Nations Unies.