Thé au Sahara
Il
y a trente ans, la province Oued Ed-Dahab a réintégré le giron
national. A l’époque, le choix de nos frères sahraouis, clairement
affiché, avait représenté un démenti cinglant au mouvement
sécessionniste qui s’évertua, avec l’appui total de puissances
régionales nourrissant une aversion certaine pour le Maroc et son
système, à revendiquer l’indépendance. Nul besoin de rappeler les
péripéties qui allaient s’ensuivre sur les champs militaire et
politico-diplomatique. Le Royaume a su raison garder en n’élargissant
pas le champ des hostilités. Evitant ainsi au Maghreb de sombrer dans
l’irréparable qu’une guerre ouverte aurait pu engendrer. Souvent,
l’exemple type de l’erreur avancée par les stratèges, et que notre pays
a su éviter, est la guerre Irak-Iran qui avait conduit les deux pays du
Golfe au bord de la banqueroute.
Et c’est fidèle à ce même
engagement pacifique, celui qui n’insulte pas l’avenir, que le Royaume
a su comment résoudre une équation assez complexe dans sa stérilité, en
déployant d’immenses efforts pour la mise à niveau de ses provinces
sahariennes. En misant aussi sur le facteur temps qui a permis de venir
à bout d’une «construction républicaine factice» que des appétits
régionaux montaient au créneau pour affaiblir le Royaume. L’Etat
croupion n’a pas vu le jour, malgré la mobilisation d’une machine
diplomatique hostile aux intérêts marocains, et l’ossature même du
Front Polisario a fini par se fragiliser, comme en témoignent les
défections qu’il essuie de temps à autre et qui rappellent à qui
voudrait le comprendre que l’unité des rangs des sécessionnistes a
perdu de sa superbe «révolutionnaire».
Aujourd’hui, dans les camps
de Lahmada, c’est l’horreur qui est renvoyée comme image à la
communauté internationale. Des dizaines de milliers de nos frères
sahraouis qui croupissent dans le dénuement total endurent le martyr.
Quand bien même une partie des aides internationales qui leur est
allouée finit pas atterrir dans le Sud algérien. Car là aussi, et c’est
une autre preuve de la conception «révolutionnaire» du Polisario, la
gabegie s’est installée via les détournements systématiques. Plus,
c’est l’armée algérienne qui prête main forte au reliquat des
sécessionnistes qui voudraient en découdre avec le Royaume, parce
qu’ils ont été formatés ainsi, pour encadrer des milliers de réfugiés
qui ne nourrissent qu’un seul rêve : revenir dans le Royaume qui a
démontré, à plusieurs reprises, qu’il restait clément et
miséricordieux.
A quelques encablures de là, les observateurs
internationaux ne sauraient se détourner d’une réalité vécue dans les
provinces du Sud. L’effort de développement consenti, et il est énorme,
permet aujourd’hui à Laâyoune et à Dakhla, pour ne citer que ces deux
cités stratégiques, de se présenter comme autant d’espaces où il fait
bon d’y vivre et investir.
Voilà le prix de trente ans d’actions
constructives qui rappellent à qui voudrait l’entendre que les
Marocains sont fiers de ce qu’ils ont pu accomplir, dans l’adversité,
pour parachever leur indépendance. Et ils ont le droit de savourer,
tranquillement, le thé au Sahara qui est le leur.
En commémorant
le 30e anniversaire de la réintégration de Oued Ed-Dahab, le Maroc sait
que les défis qui restent à relever ne sont pas aussi simples. Car il
s’agirait, pour lui, de transformer l’essai sur le plan diplomatique.
Et ce n’est pas pour rien que l’offre de l’autonomie, large mais sous
souveraineté marocaine, a été lancée il y a quelques années. Histoire
de clore définitivement un chapitre noir dans la vie de toute une
région. C’est la solution pour assurer, enfin, le déblocage politique
nécessaire à l’édification de l’espace maghrébin auquel les peuples de
la région aspirent. Eux qui en paient les surcoûts politiques,
économiques, sociaux et culturels. Cette issue raisonnable n’a pas
manqué d’être saluée, à sa juste valeur, par la communauté
internationale. Pourvu que cette déferlante puisse franchir les
barrières psychologiques que d’aucuns érigent, dans leurs têtes, pour
se permettre le luxe d’insulter un avenir en commun. Qu’on le veuille
ou non…
Allal El Maleh